Les amants éternels

                                                                                                                    Par Thomas Burnet.

 

 

« - Hé ! Tu es là ?

  - Oui, là, à ta gauche. Non, au-dessus¼ tu me vois ?

  - Ah ! oui. Comment vas-tu ? Tu n’es pas blessée ?

  - Non, mais que s’est-il passé depuis l’accident ?

  - Je ne sais plus très bien, attends¼On allait à l’Eglise, non, avant le mariage on ne doit pas se voir, ça porte malheur. Justement, on s’est vu. Je conduisais et tu étais à côté, avec ton amie, au téléphone, ils nous attendaient tous. Mais il y a eu ce poids lourd¼

  - Non, c’était une locomotive¼ ou des bandits de grand chemin, tout est flou dans ma tête. J’ai mal.

  - Viens dans mes bras, il faut se souvenir. Il faut se rappeler. Mais à quelle époque est-ce que l’on a vécu ? Je me souviens de ma mère, née en¼1951, mais mon père, lui, est né en¼1846 !?!?!

  - Mais au fait, où sommes-nous ? Je ne me souviens plus de rien. Comment se fait-il que la seule chose dont je me souvienne, c’est d’un énorme bruit, des cris et une douleur intense ?¼ J’ai peur, Paul, j’ai si peur¼

  - Moi aussi j’ai peur mon amour, mais nous sommes ensemble et c’est ça le plus important. Bon, d’abord, nous devons savoir où nous sommes. Que vois-tu autour de toi ? Vois-tu aussi ce vide, cette obscurité omniprésente, ces étoiles autour de nous ?

  - Oui, mais je ne sais toujours pas où nous sommes. Ô regardes, là-bas, est-ce la Terre ? Et là, tout autour, les satellites qui peuplent l’espace depuis 75 ans. Ne te souviens-tu pas de cette même Terre, mais paisible, calme ?

  - Mais, oui, tu as raison. Et ce trou, là, dans la couche d’ozone, je me souviens qu’avant, il n’y était pas.

  - Avant ??? Avant, mais sommes-nous déjà venus ici ? Oui, je le sens, et au fond de moi je connais cet endroit. Regarde autour de nous, tous ces gens qui volent autour de nous. Ils sont comme nous ? Regarde celui-là, il fonce à nouveau vers la Terre. Pourquoi lui ?

  - Je ne sais pas. Mais je crois que nous sommes dans un stade transitoire.

  - Quoi ! Qu’est-ce que tu racontes ? Fred, tu deviens fou !

  - Tu vois, tu m’appelais Paul tout à l’heure, maintenant je suis Fred. Comment t’appelles-tu ?

  - Quelle question ? Mon nom est Juliette et tu es Roméo. Non, je suis Virginie ! Mais non ¼je m’appelle Marguerite¼Que m’arrive-t-il ? Suis-je folle ? Pourquoi est-ce que tout se bouscule dans ma tête ? Au secours, mon amour ! Mais toi, tu es mon amour, et c’est encore la seule chose dont je sois sûre¼

  - Calme-toi, tu n’es pas folle. Je crois que tu es juste morte, tout comme moi. Et nous attendons d’être rappelés sur Terre. Je crois deviner que notre destinée est de nous aimer. Te souviens-tu t’être appelée Iseult ?

  - Oui, je m’en souviens, comme je me souviens d’un rêve. Mais, mon chéri, je ne veux plus souffrir, je ne veux plus mourir, je ne veux pas te quitter.

  - Mais, mon amour, c’est ça la vie, quelques instants, qui se répètent à l’infini, et dont le souvenir est toujours de plus en plus vague. Si l’on meurt âgé, on a un peu plus de souvenirs, si l’on meurt jeune, alors la boucle se referme un peu plus vite.

  - Je n’en peux plus, je ne veux pas y retourner, je veux me reposer.

  - Pas moi.

  - Mais, naître, vivre, mourir, pour tout recommencer une nouvelle fois, quel sens, quel but ?

  - Ecoute-moi, peu m’importe le nombre d’existence que je vais avoir, peu m’importe le nom que je porte, si pendant une seconde, j’ai le bonheur de vivre heureux avec toi. Je suis capable de désirer ce cycle à l’infini, pour revivre cette seconde éternellement.

Mais sens-tu cette force qui nous tire vers la Terre ? Il est temps de revenir.

  - Allons-nous nous revoir ? Comment te reconnaîtrai-je si j’oublie ce que nous venons de vivre ?

  - N’aie crainte, ton âme te le dira ; car si nous nous sommes retrouvés ensemble hors de la vie, c’est que nous sommes liés pour jusqu'à la fin des temps¼ »

 

                                                                           

Habitação